Nous organisons régulièrement avec le club des vins des anciens des grandes écoles en Paca, le Greco Vins, des sorties dans un domaine viticole. Nous étions ce samedi au Château Revelette, dans les Coteaux d’Aix en Provence.
La propriété
Peter Fischer a repris le domaine en 1985, après avoir travaillé à la cave. C’est un ingénieur agronome allemand originaire de Baden Baden. Il pratique la viticulture bio mais préfère parler d’une approche de « terroir ».
La propriété est en fait une ancienne ferme du 15ème siècle, époque où le lavandin était largement cultivé dans la région. La bâtisse et les jardins ont été agrémentés au fil des différentes acquisitions par la bourgeoisie aixoise de la fin du 19ème siècle à nos jours.
Production
La production totale s’élève à environ 125 000 bouteilles, sur une surface de 30 ha, avec une répartition comme suit :
- 55 % rouge
- 20 % blanc
- 25 % rosé
Cépages
- Le Cabernet Sauvignon vient remplacer le mourvèdre, trouvé plus au sud sur Bandol ou plus au nord en vallée du Rhône, car il ne mûrit pas correctement ici.
- Le Grenache et la Syrah, cépages emblématiques du sud.
- Le Carignan, ayant souffert d’une mauvaise image pendant des années dans le Languedoc, prend de plus en plus d’importance, avec un contrôle drastique des rendements. Il garde particulièrement bien son acidité.
- Le Cinsault fait également partie du panel des cépages, il apporte de la souplesse dans les assemblages.
- En blanc, ce sont le Chardonnay, l’Ugni blanc, le Sauvignon blanc, la Roussanne et le Rolle qui permettent l’élaboration de vins aromatiques mais toujours avec une belle fraîcheur.
Conduite du vignoble
Peter insiste sur le fait qu’il fait des vins de terroir et non des vins bio par simple effet de mode. Sa production de rosé est d’ailleurs bien moins importante que la moyenne de l’appellation, car il n’aime pas produire des vins « haribo ».
Au vignoble, Peter suit donc les principes de la viticulture en bio et quelques pratiques issues de la biodynamie. Il fait un apport de compost bien décomposé pour limiter l’apport d’azote et laisse l’enherbement un rang sur deux. Les rendements sont en moyenne de 30 à 35 hl/ha. Selon Peter, pour parvenir à produire plus que cela, il faut intervenir de façon non naturelle car le seul facteur limitant dans la région est l’eau.
La viticulture en bio va permettre la pleine expression du terroir, et non une culture de type « hors sol » comme le souligne Yoann Malandain qui vinifie au Château Fontvert à Lourmarin. La production est de qualité très régulière d’une année sur l’autre, la minéralisaton de la matière organique dans le sol se fait bien mieux qu’en culture conventionnelle et l’enracinement est plus profond.
Par ailleurs, l’avantage de se trouver sur la commune de Jouques est que cette dernière est très étalée. Donc la présence de vignerons non bio n’affecte pas les vignes en culture biologique.
Terroir
Les sols sont très calcaires, avec un pH un peu élevé mais Peter explique que la pratique de la biodynamie aide à faire baisser le pH.
La pluviométrie est en moyenne de 600 à 700 mm/an. Mais certaines années exceptionnellement sèches, elle peut passer en dessous des 400 mm (en dessous du désert). La vigne a une capacité phénoménale à s’adapter à la sécheresse car on a pu trouver, lors de travaux de voirie, des racines situées à 50 mètres du cep de vigne.
Les vignes sont parfois touchées par le gel, comme cette année où cela a eu lieu à 4 reprises, la dernière datant du 16 mai.
Vinifications
En cave, Peter a la chance d’avoir plus de place que ce dont il a besoin.
Les vins rouges sont vinifiés dans des cuves inox thermorégulées pour les cuvées classiques et dans des foudres pour les grandes cuvées. Les blancs et les rosés sont vinifiés dans des cuves inox thermorégulées .
Tous les vins sont vinifiés en levures indigènes, à l’exception des rosés pour lesquels Peter utilise des levures non aromatiques, qui vont garantir le respect du goût originel du raisin et du terroir tout en garantissant des fermentations correctes.
Peter ne fait aucun collage ni filtration sur ses vins, à l’exception des blancs qui sont filtrés.
En 30 ans, Peter explique que les vins rouges ont pris en moyenne 3 degrés. Son astuce pour contrôler les degrés consiste à laisser la vigne produire un peu plus, ce qui dilue légèrement les moûts. Le problème est que pendant des années de nombreuses personnes ont voulu faire des vins « parkérisés », extrêmement concentrés pour lesquels on pouvait descendre à 20 hl/ha. Cela, rajouté au réchauffement climatique, a contribué à cette montée des degrés alcooliques.
Les vins rouges sont élevées en barriques, en demi muids et en foudres. 12 mois pour les grands rouges, 6 à 8 pour les autres. Seules les barriques neuves gardent les vins 18 mois, car leur intensité en tanins nécessite plus de temps pour s’intégrer avec harmonie au vin. Le grenache étant très oxydatif, Peter va de préférence mettre ce dernier dans les barriques âgées, et au contraire élever la syrah dans les barriques neuves.
La cave d’élevage, partiellement creusée dans la roche, a une température naturelle de 10 à 15°C au cours de l’année, sans variations brutales. Le taux d’humidité est de 90%. Plus ce dernier est élevé, plus le vin va évoluer lentement car le bois va gonfler sous l’effet de l’humidité, et donc réduire les échanges avec l’air.
Les cuvées « Pure » en blanc et en rosé sont en expérimentation permanente. Elles sont élevées dans des amphores en béton naturel non armé pour éviter l’effet cage de Faraday. Ces cuves respirent, comme le bois, mais sont absolument neutres du point de vue du goût. Chacune pèse 1.2 tonne, la forme en oeuf est autoportante et évite leur effondrement sous l’effet du poids. Elles sont construites d’après le nombre d’or, ce qui permet aux molécules du vin d’être en mouvement permanent dans la cuve et d’aviter l’oxydation. Leur contenance est de 660 litres (3 barriques).
Vins
Domaine Revelette blanc 2015 (AOC Coteaux d’Aix en Provence)
40% Ugni blanc, 35% Rolle et 25% Sauvignon blanc élevés en cuves béton.
Nez vif avec des notes de pamplemousse, de menthe et de pêche blanche. Très belle fraîcheur. Parfait pour des plats sans fioritures comme une plancha de poisson.
Le grand blanc 2014 (AOC Coteaux d’Aix en Provence)
60% chardonnay, 25% roussanne, 15% sauvignon blanc. Macération à froid et débourbage. Les jus de goutte sont élevés en cuves et foudres, les jus de presse en barriques (donnent beaucoup de gras).
Nez sur la pâte d’amande mais avec une belle fraîcheur. On retrouve les notes mentholées. Superbe minéralité. Parfait pour une bouillabaisse ou un poulet de Bresse aux morilles.
Château Revelette rosé 2015 (AOC Coteaux d’Aix en Provence)
60% Grenache,25% Cinsault, 10% ugni blanc, 5% Carignan
Belle fraîcheur, notes de grenade, framboise et pamplemousse.
Rosé PUR – Produit Uniquement de Raisins – 2014 (Vin de France)
Carignan 76%, Syrah 12% et Rolle 12%
Couleur plus prononcée, rappelant un Tavel. Fermentations malo-lactiques et pas de filtration.
Nez sur la cerise griotte et les fruits jaunes à noyaux (nèfle). Au palais, superbe acidité, arômes prononcés de fraise mara des bois, légère trame tannique.
Peter recommande de carafer ce vin avant le service.
Château Revelette rouge 2013 (AOC Coteaux d’Aix en Provence)
50% Grenache, 30% Syrah, 20% Cabernet Sauvignon élevés en cuve
Au nez le grenache domine avec des notes de réglisse et de prune. Au palais les notes sont très poivrées, belle fraîcheur, une touche mentholée et un tanin fin et soyeux.
Rouge PUR 2015 (Vin de France)
100% grenache
La robe est claire et légèrement trouble (vin non filtré). Nez caractéristique du grenache sur des notes de réglisse et de pruneau. Tanins assez prononcés, superbe acidité.
Grand rouge 2015 (AOC Coteaux d’Aix en Provence)
40% Syrah, 40% cabernet-sauvignon, 20% grenache
Nez sur le cassis et le café. Au palais, arômes de cèdre et de tabac. Acidité remarquable. Tanins prononcés mais non asséchants.
Merci beaucoup pour cet article très intéressant sur un domaine bien connu et très apprécié, faisant partie de l’appellation « Coteaux d’Aix-en-Provence ».
Merci, et à la vôtre!